• Q- HUI - LEUX

     

     « Le Roi Lion, une fois pour toute,  décida de mettre de l'ordre dans son royaume.

     Il avait réuni toutes les espèces d'animaux.

    - Les beaux, esthétiques, agréables à vue, mignons : à gauche !

    - Les cultivés, diplômés, savants, éduqués : à droite...

    Au milieu des deux rangs se tenait une grenouille.

    - Mais, je rêve ! -  avait rugi le roi autoritaire. Qu'est-ce que tu fous encore là, 'spèce de counnasse ?!

    - Je vais tout de même pas me couper en deux ! - rétorqua la grenouille offusquée. »

     Le régime communiste ne tolérait chez ses « co-camarades » qu'une différence : homme Chasseur et femme Cueilleuse.

     Le modèle de Grace Kelly n'avait jamais émerveillé ni les comms au pouvoir, ni Tygrys, mais lorsque ce dernier avait découvert Marilyn Monroe

    marilyn_monroe

    à la télé, et encore mieux, Jane Mansfield

    jane mansfield

    dans un Playboy chiffonné de son pote, Mieciu (Mieczysław)... tout avait changé !

    Les adultes racontaient que les deux « seksbomby » à la chevelure platine se ressemblaient comme deux gouttes d'eau à la différence près, que Marilyn était un peu plus « noeuneude miaulante » avec un QI (?) frôlant zéro, alors que le tour de poitrine de Jane, en centimètres, suivait le même nombre que son « QI XXL » : à savoir 163, paraît-il.

    A cette époque, j'étais convaincue que ce fameux QI dépendait du tour de poitrine et avec mes 52 cm. j'étais donc très arriérée.

    Et puis, elles montraient surtout leur poitrine car la graisse sur leurs fesses adipeuses et huileuses...

    Nul n'est parfait. Peut-être Grace, mais elle ne montrait que sa grâce à elle.

    J'ai constaté pendant les vacances d'été que quelque chose « me poussait » devant.

    Maman, m'avait obligée, sévèrement même, à porter une deuxième pièce en plus de celle et unique de culotte - maillot. Quelle plaie ! Cela tirait, grattait partout, - la peinture d'Apaches devenait nulle et les copains me regardaient comme si j'étais « un autre »...

    Vilaine Constatation (VC) : La silhouette d'une fillette de dix ans, aujourd'hui, correspondrait à merveille aux canons de la mode féminine...

    chetiflore
     

    En décembre on  m'avait sournoisement « éjecté » de mon rôle annuel au sein des « escort girls » en quelque sorte, de St. Nicolas de notre paroisse, et ainsi de ma mission d'ange.

    Durant quelques années je l'avais assumée à la perfection.

    Les cheveux longs et bouclés dans lesquels se tenait un diadème en forme d'étoile qui brillait de mille feux. Une longue robe blanche couvrait mon corps de nageuse et, derrière, j'avais de véritables ailes d'ange réalisées avec de vraies plumes d'oie d'un coussin éventré lors de notre dernière bataille avec mon frérot (pour de vrai !). L'étoile posée sur mon front n'était pas plate comme chez toutes les autres : elle était en « relief » et sa brillance était provoquée par les fins débris de boules de Noël longtemps broyés avec papa...

    D'habitude je restais aimablement plantée derrière le Saint Nicolas (abbé Ziggy Pop) et je distribuais gentiment les « cadeaux » (à IG scandaleux !) aux « petits cons » du coin, toujours affamés et aux dents bouffées par des caries galopantes...

    dent_cariee2

    Et clac !  Un beau jour, ces « organisateurs paroissiaux » ayant détecté chez moi, ces deux bosses de gonzesse, m'ont écartée de cette fonction angélique !

    J'étais offusquée, humiliée ! Cependant pas trop longtemps car c'était fatiguant de me rappeler sans cesse que je devrais en être...

    Je me suis donc adonnée à une autre activité - plutôt mentale.

    Durable et valorisante, fondée sur un test de QI :

     « - Dis moi, quel est le nombre qui suit le 8 ?

    - Neuf !

    - Très bien ! Et, le 9 ?

    - Dix !

    - Très bien ! Mais encore ? Le nombre qui suit le 10 ?

    - Valet, Dame, Roi, As !

    - Et quelles couleurs de base, connais-tu ?

    - Un trèfle, un carreau, un cœur, un pique...

    - Une non couleur ?

    - Sans atout ...

    - Et 4 x 13 ?

    - 52 !

    - Et 3,14 ? Qu'est-ce que tu dis, hmm ?

    - Je passe. »

    Oui, au lieu de me tenir comme une courge à maturation précoce (et en collant côtelé blanc - hi-deux !) en qualité de « vingt-cinquième ange gardien », je préférais faire « la quatrième au bridge » tout simplement... Ceux qui en jouent seront en mesure de dire ce que cela représentait !

    Mes « actions » avaient immédiatement et considérablement montés, en m'éloignant un peu plus de Dieu, certes, mais même à mes 10 ans, du coup j'étais convoitée, adulée, « achetée » par tous les bridgeurs adultes visitant notre maisonnée.

    J'étais enfin considérée comme quelqu'un de bien : matériellement présent et divinement utile... 

    Mon seul problème : à chaque fois lorsque j'avais totalisé les 16 points et plus, dans les cartes tenues en main... de joie et de fierté je battais les pieds, en me trémoussant dans tous les sens, tout en devenant (au féminin) « czerwona jak burak » - rouge comme une betterave de même pigmentation.

    - Mais qu'est-ce que tu as ? - sifflait « reptilement » Tygrys, profondément irrité...

    Maîtrise-toi, voyons !

    « Puściłaś bąka czy co ? » (T'as commis une flatulence  ou quoi ?)

    - Oh, pardon ! Non ! Rien... Ce que j'en ai vraiment beauc... Et puis zuuuut ! - bredouillais-je confuse...

    Parfois, je voulais redevenir un ange de garde du corps de Saint Nicolas...

     http://www.youtube.com/watch?v=lYHp579ID2E


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  • À BAS COLLANT !

     

    Les collants blancs des cygnes, sur leurs longues jambes de Flamants Roses ne cesseront jamais de m'intriguer...

    Fins, à moitié transparent (juste ce qu'il fallait) et qui ne s'enroulaient certainement pas d'une heure à l'autre...

    Je portais, pour ma part, des collants épais en tricot côtelé - « dzianina » - sorte de coton grossier.

    Parfois, quand il faisait -25°C, l'un sur l'autre, et en laine qui faisait des bouloches.

    Le problème commençait au lever matinal, vers 7h, lorsqu' en le mettant, je ne regardais pas trop bien s'il était droit.

    On aurait dit qu'il n'avait que les deux jambes gauches, ou droites...

    rajstopy

    Cette partie vestimentaire s'appelait « rajstopy » (à prononcer : raïstopé) ce qui, traduit à la légère signifiait : le paradis (raj) des pieds (stopy, au pluriel)- ! Raj...

    Je ne comprendrai jamais notre Eve Initiale qui se précipita « ailleurs » que vers le paradis... Ou bien, elle espérait, peut-être que tout le monde sur cette Terre portait de magnifiques dentelles ajourées...

    Revenons-en au collant. Il s'enroulait autour de la taille comme une bouée de sauvetage et progressait quelque part, dans une direction que lui seul connaissait (un peu comme un GPS qui vous guide vers des contrées lointaines - sauf que mon collant à moi ne me tenait pas au courant de notre destination commune - remonte la jambe droite - attention, remonte la jambe droite).

    Il allait simplement... ailleurs... mais surtout pas « à moi » !

    Un autre aspect de cette pièce : elle était absolument et docilement extensible, et si je me mettais à genoux (enfin, sur les miens) le tissu se déformerait, gonflait et restait ainsi figé toute la journée, voir une dizaine de jours. Dans ce dernier cas je dirais simplement qu'un kangourou pouvait, à l'aise, y mettre ses pattes de derrières, et faire des nœuds en floches avec les bouts qui dépassaient encore devant...

    Mais ce collant, sans la faculté de coller, était très pratique car, de temps à l'autre, il prenait une dimension immense et unique qui pouvait servir de « kalesony męskie » (caleçons longs d'homme) lors de nos déplacements dans le Beskid Śląski pour skier...

    A de nombreuses reprises, il avait rendu service à mon frère, humilié jusqu'au dernier poil de son mollet...

     Je rêvais de pouvoir glisser mes jambes dans ces « étuis » délicats et légers. Ne pas avoir, à la taille ces quelques centimètres de plis indésirables sans cesse enroulés et avec un élastique défaillant...

    J'étais obsédée par le vrai beau collant lequel, à mon âge, ne pouvait accueillir mes jambes « de poulet », que le jour de ma première communion.

    Et encore...

    Plus tard, cette « toile arachnéenne » chic et finement tissée que j'avais pu enfin enfiler, était de toute façon complètement dissimulée par le genre de « burka » (comme ça se prononce...) de moine, blanche et épaisse, faisant partie de notre accoutrement de fête.

    Et puisqu'elle était imposée dans le cadre de l'uniformisation religieuse, à son tour - tout le monde portait la même chose... A l'exception de quelques joufflues qui avaient su se déguiser en véritables jeunes mariées. Je précise tout de suite : ce n'étaient pas mes copines !  

    J'attendais donc avec impatience une autre chose à enfiler sur mes « patyki » (bâtonnets).

    Quelques années plus tard, j'ai découvert un jean et je m'en sépare plus...

    Nous allâmes régulièrement au Teatr Śląski de Bytom, pour voir et écouter de près les opéras tant polonais qu'étrangers. En compagnie de maman et de mon frère...

    NB. Maman, après la « séance » de bien-être de papa vécue après le « Lac des Cygnes », n'insistait plus sur sa présence aux mondanités théâtrales, en prenant ostensiblement une « tabletka z krzyżykiem » : c'est à dire un placebo quelconque et fortement « paracetamoleux » (si pas entièrement toxique...) à l'usage universel et même contraceptif, à condition d'être fermement serré et retenu entre les deux genoux...

    Voici un exemple de ce « placebeux rémediant » :

    Tabletki-z-krzyzykiem_Szymon-Holownia,images_big,15,978-83-240-0835-3

    « Tabletki z Krzyżykiem - premier soin des craintes concernant  Dieu, la fin du Monde, le Purgatoire et les Revenants... » - dit l'affichette embrouillée...

     Les soirées commençaient habituellement par quelques coups de poing ou de pieds que nous échangions avec mon frère.

    Puis, séparés, avec maman au milieu, nous restions écroulés sur les sièges en velours rouge, mous et accueillants.

    Il se passait des choses sur scène !

    On s'aimait - on se menaçait - on se détestait - on s'embrassait : routine comportementale humaine tout simplement. De toute façon je n'y comprenais que dalle de ce qui se passait. Mais lorsque nous pouvions voir les artistes de près... Là, pour moi, le vrai spectacle commençait ! Et cela, sans aucun rapport avec l'art dramatique.

    «Au su» (par le programme) d'une jeune montagnarde issue de Tatras, droite et candide, charmée, abusée et abandonnée par un vilain noble, (dans « Halka » - diminutif de Halina - du compositeur polonais, Stanisław Moniuszko), et à la vue d'une grosse et imposante soprano dramatique hongroise, à la poitrine plus que généreuse s'arrêtant aux alentours de ses cuisses, avec une fausse tresse blonde sur sa tête sombre d'austro-hongroise - au comportement « aïe mégère » - je m'écroulais de rire ! « L'Apsztyfikant » en question (en silésien - le soupirant), frêle et menu, courrait autour de sa « belle » « jak kot z pęcherzem » (comme un chat avec la vessie pleine) en faisant « le beau », comme les caniches miteux, Żabka ou Samantha, de notre immeuble.

    Pour quoi faire ? Pas bien compris...

    Bien sûr, j'aurais plutôt dû lui suggérer de sauter au dessus d'elle au lieu de parcourir tous ces mètres inutilement.

    Déception !

     NB. Ma copine, Ela la Mécréante, était devenue également un soprano dramatique, au thorax surdéveloppé, ce qui, en son temps, lui avait permis de « régler ses affaires » administratives et autres, très rapidement. Aurait-elle pu travailler comme éducatrice sur une cour de récré ? J'en sais rien.

    Elle était très belle !   

     Dans une scène de « Straszny Dwór » - « Manoir Hanté »,

    http://www.youtube.com/watch?v=gfz7mvP7BeY 

    du même compositeur, les chanteurs joyeux, en buvant à la santé de quelqu'un, entrechoquaient leurs coupes en carton gris tout en s'égosillant dans toutes les directions. Les chocs non contrôlés faisaient que ces coupes ressemblaient de plus en plus à des éventails chinois pliés...

    Mais là, où je ne pouvais plus retenir mes rires de chèvre, c'était tout de même le « Rigoletto » de Giuseppe Verdi.

    Le célèbre bouffon bouffi à baryton, d'une soixantaine d'années, à la corpulence impressionnante, était apparu sur scène pour s'y produire en véritable collant « rajstopy » comme le mien : bleu foncé, côtelé, difforme et bouloché !

    La différence entre nous, ce que lui, il avait les jambes en « X » et les genoux serrés comme s'il retenait une « tabletka z krzyżykiem » ou pour que ce collant ne glisse pas, et sur un de ses gros genoux figurait un trou de la taille d'une assiette à dessert (je parle comme Hans Christian Andersen car dans ses contes, il transcrivait toutes les « rondeurs » en pièces de vaisselle).

    L'opéra « Rigoletto », portant bien son titre, s'était gravé à jamais dans ma mémoire...

    Quant à « rajstopy » ?

    Il « suivait » mes jambes encore quelques années pour donner la place aux collants en nylon, multicolores et affriolants (pour certains), mais c'est une autre « paire de manches »...

     


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  • VISION-Ô-CUL-TE

     

     « Sois vigilant face à l'ennemi de la nation »  - dit l'affiche de la propagande...

    badz czujny

     

     au lieu d'épier ta voisine, haaa...

     

    voisine

    http://www.youtube.com/watch?v=jDGJIx9R4s8



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  • CYGNES ET STIGMATES DE PAIX

    http://www.youtube.com/watch?v=ph3h2IJAsgk


     La culture élargit les horizons...

    Particulièrement dans le cas de la Pologne, abrutie et noyée dans l'eau stagnante et vaseuse de la « politicaille politisante » de nos comms, en expansion la plus totale.

    Afin d'attiser et stimuler les esprits de la population locale, ouvrière et travailleuse, les autorités municipales et hautement politisées de Katowice (ville lieu) avaient donné naissance à la Filharmonia Śląska à Katowice et Opera Śląska (sûr, tout était « Śląska, i, ie » - silésienne, silésien, silésiens) située à Bytom, 15 km. de Katowice.

    Un beau jour, pour nous, mais frôlant plutôt le cauchemar pour Tygrys, nous eûmes l'opportunité (papa la corvée...) de recevoir de la part d'un puissant service social de « son » espace polytechnique, de « son » usine, - quatre entrées pour le ballet « Jezioro Łabędzie » - « Lac de Cygnes », de Piotr Illitch Tchaïkovskiï.

    Maman (notre violoniste attitrée), visitée par une émotion sans limites et sans frontières, ne savait plus où se mettre pour préparer notre venue dans « son » espace spirituel, cependant différent de celui de l'église (entre nous : la scène ou l'autel possèdent la même magie, et la même qualité où l'on voit plusieurs personnes s'y produisant, de loin... C'était sans doute pour manque de maestria qu'on avait laissé aux leaders communistes qu'un simple parloir).

    Les véritables parures, les vêtements neufs, les chaussures cirées, mon frère et ma maman chez le coiffeur (lui pour une coupe de sa tignasse abondante, maman pour une "meule de foin choucrouteuse"), moi : au bain (!), papa au costume de réunions du parti, et la chemise blanche outrageusement amidonnée...

    Plus il complétait son accoutrement théâtral, plus il se raidissait tant à l' intérieur qu'à l' extérieur...

    Derniers préparatifs : eau de toilette « Soir de Paris » pour maman, eau de Cologne pour papa (de plus en plus raidi par le stress de l'inconnu...). Avec mon frère nous restions, presque, inodores car, après le bain au savon gris de Marseille - une horreur (qui puait heureusement uniquement lors du contact avec de l'eau chaude) - il n'y avait plus rien qui tenait à cet âge.

    Contrairement à tous les autres départs, aux champignons, à Cracovie ou en  promenade, mon Tygrys rasait du près les « murs, toujours aux oreilles » de notre habitat, il traînait par ci, allait par là, toilettes, re-toilettes (émotions ou problème de prostate ?) - il s'é-ter-ni-sait tout simplement !

    Je connaissais ça très bien et je le comprenais, mais pour une fois...

    Au théâtre : bonjour à gauche, bonjour à droite - tous les travailleurs de l'usine étaient au complet. Une centaine de dames, « aussi vieilles » que maman (36 ans) habillées identiquement. Maman était la plus belle : telle Grace Kelly, elle trônait avec son « kok » sur sa tête, artificiellement et chimiquement gonflé et malgré la même robe que les autres, on voyait qu'elle était différente. D'abord je pensais que c'était à cause de son « Soir de Paris » (cadeau d'une copine globetrotteuse) mais non : c'était l'émerveillement qui émanait de chaque pore de sa peau.

    Le spectacle avait commencé : un petit bonhomme, le « kapelmeister »,  du genre Einstein (visiblement, en tant que vedette il s'était permis de ne pas aller préalablement chez le coiffeur, au grand désarroi de mon frère) avait commencé par une série des bruits stridents, « d'essai des instruments », comme s'il ne pouvait pas faire cela plus tôt !

     Enfin. Silence (je détestais ça car je risquais succomber à une attaque de fou rire) : ouverture délicate et sensuelle...

    - C'est Tchaïkovski ? - disais-je pour confirmer auprès de maman 

    - Non, il ne me semble pas... - répondait Tygrys en fixant avec l'insistance quelqu'un assis au premier rang. Attends... difficile de dire, de son profil... En verra mieux lorsqu'il se retournera plus vers nous... Si c'est lui, n'oublie pas le saluer. Je crois que l'ai déjà rencontré à une réunion ou l'autre...

    Khhhhhhhhhhh, fchhhhhh, - rappel de maman furieuse contre mon père - iconoclaste.

    Nous étions assis très près de la scène.

    Et lààààààààààà !

    Waouuu ! Une myriade de petites cygnes en véritables « baletki » - les chaussons de ballerines, et les tutus diaphanes commençaient à défiler devant mes yeux recroquevillés de bonheur et stupéfaction.

    Bam, bam, bam ! Toup, toup, toup ! (Mais quoi?!).

    Tremblement des planches. Le bruit de leurs « entrechats » résonnait et les autres figures, « choréographiquement » correctes pourtant, étouffait littéralement la musique essayant de suivre tant bien que mal.

    Petite remarque : j'avais déjà vu une vraie ballerine.

    A Koszutka, un quartier avoisinant le nôtre, où les ouvriers étaient moins visibles. A sa vue, les garçons disaient : « Z tyłu liceum, z przodu muzeum » - De derrière - une lycéenne (ado) ; par devant - une "muséenne" !

    Effectivement, les silhouettes allongées (dirais-je : « spagettales ») jusqu'à l'impossible, les jambes jusqu'aux oreilles, petites têtes comme des épingles aux cheveux longs repris en « coupole », plate et lisse.

    Evidement, me suis-je dis, elles doivent absolument être ainsi, car si les grosses « parówa » (saucisse chasseur) se mettaient à danser, rien ne résisterait plus au dessous de leurs pieds...

    parowkowa frustracja

    Mon père, après avoir calculé la résistance des planchers, rassuré, s'était mis à ronfloter, « vulnérablement » affalé dans son siège, c'est à dire le ventre en l'air en guise de soumission à l'égard et au regard sévère de maman, tel une coccinelle « faisant le mort ».

    Mon frère restait éveillé pour scanner les dessous des ballerines.

    Quant à moi, je reniflais avec certain dégoût l'odeur âcre de transpiration de ces « divines diaphanes » évoluant sur la scène.

    Les signes d'extrême fatigue, dus à cet effort physique intense, s'installaient de plus en plus sur les visages défigurés de douleurs et de maquillage, comme les peintures de camion pakistanais (que j'ai connues plus tard...) des cygnes dansants.

    http://www.youtube.com/watch?v=nEjPDS8Jp1E

    J'ai pris alors une décision : j'arrête le patinage artistique.

    L'apothéose - la fin !

    Mon père avait repris des couleurs. Il était heureux ! Il se montrait aimable, même vis-à-vis des quelques comms profondément abhorrés et visiblement désœuvrés car réveillés trop tôt. Il était charmant et attentionné.

    Il avait même placé un bisou furtif sur le cou de maman pour lui dire à l'oreille (près de la mienne):

    - C'est comme tu voudras, kochanie (chèrie)...

    - Oh, oui ! Avec plaisir ! Le premier mardi d'octobre, à 20h il y ..........

    - ! Et pourquoi tu calcules déjà ainsi ? C'est moi qui calcule et toi laisses-toi faire... Alllllllleyyy !

    - !?

    - Je pense, chuchota-t-il qu'on pourrait peut-être faire ce soir, hmmmmm ? Les gosses sont crévés...

     Effectivement, la musique faisant partie de la culture, contribue à l'élargissement des horizons chez certains.

    biedronki2

     Chez les autres elle procure tout simplement un sentiment de bien-être...

     

     


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  • BOIS'TA MUSIQUE!

     http://www.youtube.com/watch?v=eKeXkhxiq6I

    « If you're goooooing toooo Saaaan Fraaaaancisco...»

    - s'égosillait un certain Scott McKenzie dans sa langue natale et véhiculaire. Ces sons agréables et la voix moelleuse sortait de notre « przenośny adapter » - un tourne disques portable, enfermé dans une élégante valisette bien verte.

    Le disque, quant à lui, était bleu car au format d'une carte postale, il ne pouvait que représenter le ciel beaucoup plus bleu et heureux que celui de Katowice.

    Après « Jambolayah » de papa, ou « Strangers in the night », de maman, c'était mon disque personnel, sans doute parce qu'il était pliable et qu'il se laissait facilement manipuler par mes petites mains peu expérimentées de « dziewczynka » (fi-fille).

    La voix agréable du chanteur diffusait « à plein tube », à longueur de journée, s'entremêlant avec d'autres sonorités, et plutôt pénibles celles-là, émanant de nos voisins de gauche, de droite, du dessous et du dessus. Chacun de nous augmentait le son pour imposer aux autres « son morceau préféré ».

    Ainsi la cacophonie immobilière perçait les oreilles de l'ensemble du bâtiment y compris les « oreilles cachées » des murs mitoyens (« ściany mają uszy » - les murs ont des oreilles, - disait Tygrys - inquiet d'une investigation probable et peu correcte de la part de l'un ou l'autre « kapuś » ou tout simplement d'un curieux de nature...).

    Le bruit intensément cacophonique nous facilitait un libre échange « d'opinions » en ce qui concernait la bonne gestion politico-économique de nos comms nationaux...  

    Ainsi, le "Jambolayah" se mélangeait harmonieusement avec « Una Paloma Bianca » et « Adieu Pamela », ou Scott McKenzie avec une polka des Sudètes. 

    Entre temps, un « joyeux quelqu'un » cassait la vaisselle en vue d'un mariage imminent, accéléré par une grossesse prématurée et, hélas, très visible. C'était la coutume des Silésiens.

    Et l'un ou l'autre, parmi les très nombreux « piesek - pokurcz » (petit chien tordu portant tout les paternités du monde sur son « paletot »...) se mettait à aboyer car il faut savoir, qu'en Pologne, ils en avait le droit :

     « Il y avait trois chiens... Un américain, un français et un russe (forcement !).

    Le premier, l'américain (comme d'hab') dit :

    - Je n'ai qu'aboyer une fois et mon Maître se précipite pour me donner à manger du filet américain (sans cornichons et sans oignons).

    Le deuxième, le français dit :

    - Moi, j'aboie deux fois et mon Maître me sert du foie gras (en bloc) et des saucisses de Toulouse.

    Le troisième, le russe, dit :

    - Allez les gars, c'est quoi aboyer ? »

    Quant aux voisins ne disposant pas d'une « boîte à musique », ils réglaient leurs comptes entre eux, ou faisait « la fête » à leur épouse, ou encore « d'autres autres » festoyaient tout simplement en faisant l'inventaire des bouteilles de « wódka żytnia », vodka de blé, entrecoupée de cornichons en saumure ou de « chleb ze smalcem », - du pain avec du saindoux de porc.

    Parfois, ayant abusé de ces merveilles naturelles ils s'en débarrassaient discrètement, à l'exception de ceux, qui habitaient au dessus de chez nous.

    La grégarité était cependant à son apogée lorsque les joyeux drillons se mettaient, eux, à étouffer les sons poussés par les professionnels du « show bizz », comme notre Scott adoré, en beuglant en chorale des chansons paillardes, toujours en langue russo-polonaise...   

    „ I job tvouju mac, my kulturnyï narod,

    My Giermantza nie boïmsya i vsiegda païdïom v pieriod !..."

    - ce que j'ai envie de traduire ainsi (tout en respectant « chaque chacun » ou « chaque chacune »):

    « Je baise ta mère,

    nous sommes une nation à grandes valeurs

    culturelles,

    Nous n'avons (même) pas peur des Allemands

    et nous marcherons toujours en avant »

     (N.d.T. - comme un rouleau compresseur en quelques sortes... ou bien, comme un char...)

    (Oufff ! Contente d'une traduction aussi bien rimée. Coool !)

     Atteignant quelques 90 à 120 décibels provenant de la « pure souche » et du « pur alcool », à savoir du « spirytus rektyfikowany » (très spirituellement rectifié) de 90° de contenance en alcool, mon Tygrys rajoutait son rugissement mélangé avec des insultes ni politiquement, ni autrement d'ailleurs, corrects,  et que je m'abstiendrai de citer...

     Stoooooooooooooooooooooooooop !

     Notre « boîte à musique » portable me donnait cependant froid dans le dos lorsque j'étais obligée de placer cette aiguille délicate et « précieuse » car en « diamant » (bofff - il ne brillait même pô...) sur ce petit 45 tours de 17 cm. Je transpirais, tirais la langue, me mordais les lèvres - mutilation faciale complète ! Enfin, j'étais parvenue à poser « la chose » - non, stop, je voudrais écouter mon Scott dès le début.

    Marche arrière, ma tête se mettait à tourner avec la rondelle cependant accueillante en caoutchouc ; ça y est :

    « Ify'regingt'SnFrncsco...»

    - criait une petite voix en accéléré de 78 tours, comme s'il s'agissait de notre seul et unique « Kaczor Donald » de Walt Disney, - mon préféré, (canard Donald), à l'époque.

    NB. De nos jours la Pologne en connaît encore trois autres « kaczory » (au pluriel et en trinité), mais dans la mesure où ils ne sont absolument ni marrants ni spectaculaires, ils ne font pas partie de mes héros comiques, de mes « komiks » (BD) préférés...

     3-male-kaczuszki-605-OBRAZKY_PL

    Puis, en vitesse au ralenti.  

    A 33 tours :

    « Ifffffffffffffffff yooooooooooooooouuuuuuuu'reeee goooooiiiiiiiiing toooo Saaaan Fraaaaanciiiiiiiiiscooooooooo...»,

    - dégoulinait une espèce de « Miś Yogi » (ours connu) de sa voix de crooner, grave et lente. 

    Et là, mon propre orso, Tygrys, mettait fin à son mal-être total, en fermant violemment le tourne disque sans se préoccuper de la précieuse aiguille...

    ...Et les effluves de vodka dans le palier « épousaient » les sons joyeusement poussés par leurs émetteurs.

     NB. Entre nous : j'ai toujours été ravie que nous n'eûmes pas un piano à queue !

     Et un bon conseil : buvons avec les autres sans partager nécessairement notre musique avec le monde entier !

     http://www.youtube.com/watch?v=8pNJwGibXSw


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