• Pologne: Robole !

    ROBOLE !


    http://www.youtube.com/watch?v=6BU9NbhO3yY

    Les fruits des sorbiers - « jarzębina » - se transformant en grosses grappes de billes bien rouges (eux aussi...), depuis toujours et pour longtemps encore, étaient le signe crapuleusement douloureux de la fin des vacances et de la rentrée scolaire...

    C'était aussi le moment où les autres, les non scolarisés, se plongeaient gaiement dans la fabrication « maison » de « Jarzębiak »

    jarzebiak2

    - une parmi les dizaines de variétés de vodka.

    Ou de « Jabol », ce vin de pommes remplies d'habitants à corps mou

    robak2

    - appelés populairement « robole » - de « robak » - un ver.

    « Un ver dodu sort d'une pomme et regarde autour de lui...

    A l'extrémité du même fruit il en aperçoit un autre...

    - Salut, belle inconnue... - dit il d'une voix suave, et visiblement ravi de cette rencontre.

    - Ta gueule, pauvre con, je suis ta queue et c'est à toi même que tu causes ! - lui répond "cet autre" ». 

    Ce n'était pas du tout agréable de quitter cet endroit si merveilleux alors que la température de l'eau de la Baltique (brassée et chauffée par les corps des touristes) devenait enfin « potable » pour s'y baigner sans risquer d'y attraper des engelures.

    Certes, celle de la Lagune était toujours plus douce et beaucoup plus « avenante », mais fortement « habitée » par toutes sortes d'espèces lacustres d'origine louche...

    « Une grenouille se prélasse sur le bord de la lagune. Afin de se rafraîchir, elle pose ses deux  pattes palmées dans l'eau...

    Une cigogne noire s'immobilise à côté d'elle :

    - Anzour vous... Elle est bonne ? - claquette-t-elle poliment.

    Silence. La grenouille ne répond pas...

    - Eh, ho ! Je te craque à toi, espèce de morue à longues pattes ! - glottore la cigogne.

    Silence...

    - Woh, putain ! Tu me coasseras ou quoi ? Je te craquette en demandant si l'eau est chaude ? - continue la cigogne...

    - Oh, fous-moi la paix ! Et puis, putain, peut-être, mais je ne suis pas un thermomètre, petite conne ! - rétorque la grenouille un poil irritée. »

     

    Cette année était cependant différente : en octobre, après avoir chanté « Gaudeamus Igitur », j'étais censée entamer mes études supérieures à l'Université de Silésie (créée en 1968), en philologie russe.

    J'allais enfin savoir, en version originale, et sans intermédiaires endoctrinés, ce qui se « tramait véritablement » dans ce pays de « Frustres »...

    lenin2 - et le dernier..

    Après les examens de sélection du mois de juin, et avant de commencer, il fallait cependant passer par un stage pratique en qualité de manœuvre ouvrier - « praktyka robotnicza ».

    Cela concernait obligatoirement tout étudiant de l'enseignement supérieur parce qu'une « future tête dirigeante » se devait de faire plus ample connaissance avec le monde des travailleurs.

    Ainsi, par la simple prise de conscience de telles conditions de travail, « elle » se mettait résolument et assidûment à étudier.

    Les études en Pologne étaient gratuites mais pas pour l'état...

    Il fallait donc les faire vite et bien !

    Dans mon cas, et celui heureusement pour moi de ma copine Celka, il s'agissait d'une usine de production, plus que crade, d'isolateurs et de fusibles électriques (youpie ! - je les adore... j'étais faite pour cela...), et secondairement, d'une tristounette vaisselle en porcelaine destinée à l'exportation...

    Et sans aucun doute à une lointaine même...

    Car étant si « immondément » laide, dépourvue du moindre design et, avant tout, si outrageusement difforme, cet « accoutrement de table » ne pouvait qu'aller ailleurs, et même au diable, parce que ni le sol polonais, et encore moins une table correcte n'aurait voulu l'héberger. 

    Toutes blondes, maquillées, habillées (en blanc, bien sûr !)

    http://www.youtube.com/watch?v=PbWULu5_nXI

    et parfumées, nous nous présentâmes, diaphanes, telles les deux papillons « Bielinek Kapustnik »

    bielinek2

    (J'ai dit : maquillées...)

    - papillon « à chou » - pour nous faire cuisiner dans cette usine...

    N'ayant aucune expérience dans ce domaine, le contremaître, frôlant l'explosion de joie comme à son habitude, nous avait projetées au « secteur cuisson ».

    La température de l'air à  l'extérieur : 28°C - à l'intérieur : 36°C.

    Par rapport à cet emploi, nous étions censées ranger, en les classant (quelle idée...), les divers objets en faïence qui sortaient du four, et qui maintenait longtemps une température de 70° C. environ.

    four2

    Conformément au règlement, l'usine nous avait attribué des vêtements de travail se résumant en un tablier blanc

    kitel2

    en tissu synthétique - « non-iron » - soit une sorte de capote très large, totalement transparente et collant à la peau (au même titre que les fréquentes mains calleuses de la classe ouvrière masculine y sévissant...) à la moindre goutte de transpiration...

    Or, nous respirions beaucoup.

    http://www.youtube.com/watch?v=V6YOhfHwpLQ

    Et dans ce mimétisme blanc d'aspect banal, en dessous de cette « merveille polymérique » facilement adhésive, nous ne portions hélas que notre lingerie féminine, limitée au strict nécessaire, et d'une couleur outrageusement visible...

    rentgen2

    Ainsi, les fusibles et autres débris de faïence ou de porcelaine s'écrasaient gaiement sur nous à longueur de journée, accompagnés des rires aux éclats des « manoeuvreux morveux » enragés, - « robotnicy », de « robić » - œuvrer...

    http://www.youtube.com/watch?v=yiNnDpIW918

    Appelés également « robole »...

    Tous les soirs, dans notre « akademik », un logement estudiantin collectif, en buvant de la bière (et autres boissons aussi...), nous échangions nos expériences quotidiennes douloureusement acquises auprès du peuple travailleur.

    Il s'agissait, en fait, d'une thérapie, car il suffisait de comparer avec les autres pour nous sentir mieux car il y avait pire : la plupart des autres travaillait dans une usine de transformation de fruits et légumes...

    Une merveille : en salopettes et en grosses bottes de caoutchouc épais,

    botte 2

    (Non, pas comme ça...)

    « genre pécheur à la mouche » (si la mouche est d'accord...), ils pataugeaient dans 20 cm. d'un vinaigre chaud - « aigre-doux » - répandu par terre, en essayant d'enfermer dans leurs pots - et à la main ! - des milliers de kilos de cornichons rebelles ...

     

    concombre 2

     

    Il y avait cependant aussi quelques véritables chançards qui travaillaient à la « section de transformation des pommes », et  donc à la fabrication du « Jabol », et eux, quoi qu'ils restaient toujours gais et enthousiastes n'ont plus jamais touché à ce breuvage...

     

     


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