• Pologne: Pas Ris de Veau

    PAS RIS DE VEAU !


    Certes, les Polonais avaient leur langue...

    Et de plus en plus compliquée... mais les Français aussi.

     Durant ces quatre années d'études au lycée - sous les ailes de notre Janina « binationale », - nous nous adonnions à « maîtriser » cette langue tant bien que mal...

    La tâche n'était pas facile : l'audacieuse Janina s'était mise carrément à nous parler directement dans cette langue ( ??? - Qu'est-ce qu'elle dit ? Qu'est-ce qu'elle veut ??) et, dans notre cas bien précis, il ne s'agissait pas d'une immersion, mais plutôt d'une diversion préméditée provoquant notre noyade linguistique...

    - Comment allez vous, Monsieur Dupont ?

    Eh, oui - Dupont - ce nom si populaire et si républicain (comme chez nous, Nowak au lieu de Romanow ou Poniatowski, les noms considérés comme « à ké brgh »...)

    - Plaît-il ?

    - Ayez l'amabilité de m'excuser...

    Ces phrases remplissaient cependant avec classe notre « classe » de sept élèves.

    Les 68 (le cinquante-dix-huit... Non, ce n'est pas encore ça...) restants stagnaient, totalement désoeuvrés dans l'air fortement vicieux attaquant les neurones, au cours d'anglais où personne ne suivait vraiment les paroles « mâchées » et à la prononciation de « stoemp en bouche »  - donc à l'américaine  - d'un certain Mister Web, - un « gentleman » à 100% - mi-Sioux, mi-Bantou - et sans doute le précurseur de l'art informatique de plus tard...

     http://www.youtube.com/watch?v=X6Y4kpZ7xQk

    Quelque années après, lorsqu'on m'agressait en s'adressant à moi avec un « ça va ? » ou « ché pas » - je pigeais que dalle...

    dalle 2

    (que dalle... une)

    Ou alors, j'étais fortement troublée et interpellée par une voyelle « surgissant » sournoisement dans un mot terminé par une consonne, tel un « bonjour-ah »...

    Janina, par rapport aux autres lecteurs de langues étrangères, au moins, était la seule à placer la langue française dans la réalité du pays  puisqu'elle y avait habité une éternité, et sa diction pouvait être jugée comme de plus correcte. 

    La bûche de Noël (?), le foie gras (?), le magret de canard (?!) et tant d'autres choses appétissantes, ou pas, se déversaient de sa bouche légèrement couverte du rouge à lèvre d'une marque magique, quoi qu'imprononçable (à l'époque), et importée lors de ses récents et nostalgiques séjours dans les merveilleux abords de la Tour Eiffel...

    Il nous était très difficile d'imaginer certaines choses, mais la bonne volonté y était.

    Et puis, en Silésie, parler cette langue de diplomates et de « salon », représentait tout à fait autre chose que le russe truffé de « gros mots » tels que : le vil capitaliste, le marasme bourgeois, camarade, secrétaire, ou encore l'allemand -douteux et piteusement « patoisant ».

     Le « Petit Prince » de Saint-Exupéry, en version originale et rempli de ses : Viens jouer avec moi... Je suis tellement triste, ou, Dessine moi un mouton... - avait déclenché en moi un « chialement » déchirant...

    Pchip ! Comme c'était triste !

    http://www.youtube.com/watch?v=wcOdFWlhxxk

    D'avoir autant des moutons dans son petit espace vital d'un petit prince...

    petit-prince-mouton 2
     

    Toutefois il y avait d'autres aspects de cette langue et donc de cette culture, que nous ignorions dans notre espace culturel.

    Le côté « frivole » des « parisiens/nnes-ah », - peu connu dans nos pays comms - austères, prudes et pudiques, - conjointement respectés au nom de la « pensée » tant laïque comm que catholique clan - destinée : le cancan, les cabarets "olé-osés", les dessous sexy et le « déversement » de flots de bons vins et de champagne - du vrai ! (et pas ce mousseux au goût du jour de « pipi de chat », souvent tiédasse, importé de la Mer Noire et appelé « Champanskoïe » - Grooo-teeesque !)

    szampanskoye 2

    Lors de notre apprentissage de cette langue, nous découvrions la France sous toutes ses coutures, hautes et basses...

     Tout ce qui venait de là, paraissait d'une beauté exquise...

     Certes, il y avait aussi des aspects moins appréciés, comme justement ces bobonnes déchaînées, en « frou-frou » de couleur ringard et à « demi-poil », qui faisaient de grands écarts sur scène,

    cancan 2

    comme les ventouses à déboucher l'évier de maman, ou cette voix, piauleuse et larmoyante, d'Edith Piaf, - cette gothique  pâle et toujours dépressive... ou, quelques fromages à consistance glauque et odoriférants...

    Il y avait également ces foutus diphtongues au, eux... - des é, è, ê, ai...

    Purrréèêai !

    Les « h » aspiré ! (en polonais deux se prononcent : « h » - « ch »- et même fort!).

    « G », « J » - devant la consonne - Après...

    Il n'y avait que le « k » qui restait encore intact et proche à nos coeurs.

    Mais surtout  le plus astreignant, c'était la prononciation du « r ».

    Ce « r », imprrrononçable, qui venait du fin fond de la gorrrge... où on ne le prononçait correctement que lors d'une trachéite ou d'une angine...

    Autrement, quelqu'un prononçant un « r » parrrreil en Pologne, volait, et à toute vitesse, pour suivre obligatoirement des séances de « redressement articulatoire » auprès d'un orrrthophoniste rrrénommé n'ayant pas de contacts avec les francophones...

    Ce qui serait probablement le cas d'Edith

    http://www.youtube.com/watch?v=Q3Kvu6Kgp88

    ou d'un Brrrel (d'où venait-il encore, celui-là ?... Des Iles Marquises ? Enfin, de quelque part où c'était petit, plutôt inconnu et multi dialectal...)

    Quoi de plus didactique que l'apprentissage d'une langue par la chanson...

    Et là...

    Après avoir brillamment chanté chaque semaine en chœur et en batterie... de casseroles - lors de nos « présentations des acquis linguistiques du mois » : « Nationale 7 »

    http://www.youtube.com/watch?v=uXNIrFStLa8

    (Ouf ! Pour une fois, c'était bien Nationale 7 et pas notre Inter-unique...) ou cette « Paulette à bicyclette » et quelques autres « tarteries » pareilles, nous découvrîmes Joe Dassin... se baladant aux « Champs-Élysées »...

    Habitués à nous égosiller à tue tête sur des chants patriotiques

    http://www.youtube.com/watch?v=1SuyxX4lQBo

    (et parfois - SURTOUT ! - paillards...) russes (tchastouchki)

    http://www.youtube.com/watch?v=V1EhKiHMr64

    et polonais, nos exploits vocaux dans cette langue étaient plutôt minables...

    Le « r » frrrançais nous décontenançaient tant visiblement qu'auditivement...

    Cependant, en comparaison avec nos autres linguistes - ceux « anglobeuglants », lesquels chantaient sur scène des paroles déchirantes destinées à mettre en valeur le peuple américain

    http://www.youtube.com/watch?v=ju0wcKcLURE

    (Fichtre ! Quel accent !)

    (avec des chewing-gum en bouche... D'un goût ! Mentholé...) - nous étions considérés comme une pure merveille...

     Il me semblait que j'avais appris beaucoup lors de mes cours de français, cependant...

    Quelque chose m'avait manqué...

    La traduction justifiée d'un terme si proche de mon cœur et de mes papilles - les « ris de veau »...

     Personne en Pologne ne les connaissait ?

     Il m'a  fallu une trentaine d'années pour débusquer, dans un vieux livre de cuisine polonaise - « Kuchnia Staropolska », de Pani Ćwierczakiewicz (-owa) - qu'un abat infiniment inesthétique  - « grasica », thymus de veau - et ravageant jadis les tables d'une élite d'aristocrates sachant bien vivre sous le nom de « mleczko cielęce » (petit lait de veau), à l'heure actuelle rentrait timidement dans les menus de certains restos polonais sous le nom d'« Animelka » - de l'italien Animella - le siège de l'âme...

    Selon Maklowicz et Bikont dans "Dialogi jezyka z podniebieniem"... chez les Polonais donc, l'âme se situait dans la « grasica »...

    Tenez, tenez...

    Alors qu'ailleurs...

    « Le mot animelles - le nom est toujours au féminin pluriel - (ou rognons blancs) est un terme culinaire pour désigner un type d'abats, les testicules d'animaux (taureau, verrat ou bélier mais plus particulièrement les jeunes béliers), lorsqu'ils sont utilisés dans l'alimentation humaine. 

    Je tiens absolument à partager cette découverte avec le monde entier, tout en remerciant le ciel d'avoir appris la bonne langue avec ses bons mets... alors que, si j'avais été dans la classe de Mister Web - je serais probablement restée près du « sweet-bread » à la menthe et ketchup sans jamais savoir ce que je mange !

    Quoi que, même maintenant, je me pose encore des questions...

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