• Pologne: Goûts-tu-piques

    GOÛTS -TU - PIQUES

    "- Hé, t'as vu ? Un risson !

    - Hé-risson !

    - Hein ?"

     

    Cette petite bête farouche et déterminée s'était trouvée sous notre toit commun.

    Le hérisson, taciturne et somnolant la journée, se transformait la nuit en véritable démon.

    Il passait par ici, il repassait par là...

    Ses petites pattes supportaient merveilleusement bien son paletot lourd de picots.

    Tous les soirs il venait vers mon père, assis devant la télévision, pour s'enrouler entre ses deux pieds posés par terre, sans doute pour regarder le match de Górnik Zabrze ? Noooon !

    Il venait pour Tygrys et je suppose par assimilation d'images.

     - Oh, regardez ! Il a tout de même l'instinct d'un animal de compagnie ! : la reconnaissance ! s'exclamait-il

    - Ben, oui... Avec ta permission, cela est, peut-être, dû  à l'odeur qui se dégage de tes pieds, disais-je de plus en plus faiblement en voyant mon père se hérisser. Mais puisque je me décidait tout de même à continuer : ...en fait, je voulais dire que chacun de nous à une odeur particul...

    - ??? Mais encore ? Ne te gêne surtout pas !

    - ...ier... ou pour une autre raison... balbutiais-je incapable de détourner mon regard de sa coiffure courte « na jeża », (jeż en polonais - hérisson) ou « en brosse », si on veut...

     Et voilà, pensais-je amèrement : le maître et son totem, les deux étaient absolument assortis...

    La première semaine, la bestiole s'enroulait tout le temps, et il était rare d'apercevoir ses petits yeux noirs comme les grains de caviar de la même couleur.

    Parfois, il fallait le réveiller pour pouvoir jouer (?) avec lui. Mais par quel côté s'y prendre ?

    - Ouais, attends qu'il pète un coup et tu verras où se trouve sa tête (suggéra intelligemment mon frère). Les hérissons sont comme ces bagnoles russes, les Żiguli : lorsqu'elles démarrent, c'est par la fumée du pot d'échappement que tu trouves où est le devant ! He, he, he... clôtura-t-il.

    ziguli 2

     

    A part ça, son « châssis » mou et couvert de poils, grouillait de puces forestières, au plus grand désespoir de maman qui essayait lui brosser légèrement son ventre.

    - Mais enfin ! Qu'est-ce qui te prend : arrête donc de chipoter ce hérisson, disait Tygrys - notre autre...

    Et comme tout le monde sait : les hérissons adorent les limaces...

    Sur l'appui de fenêtre de la cuisine, je lui avais même aménagé une  mangeoire en plaçant dans les cœurs de nos laitues de toutes petites limaces « de rien de tout », au début.

    Deux jours plus tard, elles devenaient belles et gluantes.

    Notre hérisson en raffolait, oui... ainsi que papa, et sans s'en rendre compte, en piquant furtivement un beau cœur juteux de la jeune salade...

    Tous les jours, vers 20h, les deux buvaient ensemble leur lait chaud après quoi, un, le diurne, s'enroulait en boule dans sa « wersalka » (clic-clac), alors que l'autre, le nocturne, entamait ses explorations.

    Toup, toup, toup - cavalaient ses petits pieds sur le parquet en chêne de maman. Ça allait encore...

    Bam, bam, bam - disait son petit corps en tombant dans un carton... Bof, ça allait aussi...

    Mais lorsqu'il s'éclatait en courant aller et retour en dessous des radiateurs en fonte, toute la famille en avait marre ! Un véritable virtuose en cymbales... 

     http://www.youtube.com/watch?v=GgLjwuum-SI

    On l'enfermait dans la cuisine.

    Et là... il n'avait rien à y faire...

    Un seul radiateur à trois compartiments...

    Si, si : le lendemain, encore endormis, nous marchions sur ses petits galets verts et liquides, qui sentaient la forêt...

    Quant au « noceur » - il dormait, roulé en boule, dans un sac en tissu destiné à contenir des haricots secs.

    Nous savions que cet animal s'ennuyait chez nous et que cette amitié que nous lui avons imposée n'était pas du tout commode pour qui que se soit.

    Après trois semaines il avait disparu.

    Comment ?

    Tout le monde se le demandait.

    J'étais la seule à en savoir plus et à comprendre cet ami, car hormis la place entre les pieds de mon paternel, il se mettait souvent face à la porte du balcon légèrement entrebâillée pour, à mon avis, contempler avec convoitise les clôtures de barbelés des nombreux jardins du voisinage...  

    barbelé 2

    Appelé par la nature, il avait certainement trouvé son bonheur - son amour, car de telles clôtures, en Pologne, ne manquaient pas...    


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